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Coup de fatigue ou véritable burn-out, cela n'arrive pas qu'au travail ?

Désormais très employé, le terme ne renvoie pas seulement à l'épuisement causé par trop de travail.

"Cela faisait deux mois que mon médecin, me parlant de burn-out, me suggérait de m'arrêter", se souvient Dominique, 49 ans, une sales manager pour le marché européen. Mais je n'arrivais pas à déléguer pour me faire remplacer. C'est le jour où, tétanisée par l'angoisse et la fatigue, je n'ai plus pu sortir de chez moi que j'ai compris qu'il y avait vraiment péril en la demeure.»

Avec le recul, cette cadre revoit l'enchaînement des événements ayant fait le lit de son épuisement: la prise en charge de ses parents très malades et âgés, leurs décès successifs, le déménagement de la boutique de son mari, les mauvais résultats dans son groupe générant une plus grande pression de ses employeurs…
"La goutte d'eau est venue en pleine audioconférence avec notre grand patron étranger", se souvient-elle… Je l'entendais nous aboyer dessus quand soudain je me suis levée, en larmes, et j'ai crié: "Je ne supporte plus qu'on me parle comme ça, ça suffit!" avant de retomber sur ma chaise, vidée de toute énergie.
Comme si, depuis deux ans, j'avais été mangée à petit feu et qu'il ne restait plus rien à l'intérieur de moi.»

Deux ans semblent finalement assez peu au Dr François Baumann, fondateur de la Société de formation thérapeutique du généraliste (SFTG). Pour cet expert du burn-out, ce syndrome dit d'«épuisement professionnel» est déjà à l'œuvre depuis six à huit ans lorsqu'il se déclare chez ses victimes, souvent elles-mêmes surprises de ce qui leur arrive. Ce temps d'incubation s'explique justement par la personnalité particulièrement investie, perfectionniste, engagée, responsable… de ceux qui en sont atteints: ils sont dans un tel déni de leur fatigue et de la nécessité de «lâcher» qu'ils sont incapables de déceler les signes avant-coureurs de leur effondrement.



Une façade de «battant»


C'est donc le plus souvent derrière une plainte de «gros coup de fatigue» que le médecin doit être capable de déceler une maladie rendue plus complexe par toutes les dimensions qu'elle attaque: physique, émotionnelle et psychique. Pour le Dr François Baumann, un signe notamment la rend plus facile à déceler: « La fatigue n'est pas soulagée par l'arrêt de travail court, car la personne souffre en réalité d'une maladie de la relation à son travail et aux autres. On repère donc le burn-out aussi à l'épuisement émotionnel, au cynisme relationnel et au sentiment d'échec qu'il alimente.»

Le cynisme relationnel, c'est celui par exemple de l'interne en médecine épuisé qui ne parle plus aux malades que comme à des objets: «Vous, le cancer de la prostate, vous pouvez regagner votre chambre…» ; celui de cette collègue irascible depuis des mois qui passe son temps à dire du mal des autres ou n'est plus capable d'empathie ; quant au «sentiment d'échec», il s'agit bien sûr pour la victime de burn-out de le tenir à distance le plus longtemps possible, et de le cacher aux autres derrière une façade de «battant».


Apprendre à «lâcher»


Ainsi, Dominique raconte comment, durant les premières semaines de repos chez elle prescrites par son médecin, elle ne pouvait s'empêcher de se faire envoyer des rapports à lire, d'adresser des e-mails à ses collègues pour tout savoir du service… «Je me sentais indispensable, je n'avais pas le droit de me montrer faible», explique-t-elle. Jusqu'au jour où elle a même eu du mal à supporter les bruits de la rue et a senti l'ampleur de son épuisement. «Là, j'ai compris que je devais vraiment “lâcher”. J'ai cumulé, avec les vacances, trois mois d'éloignement du bureau et organisé un réel repos à la maison: délégation des courses à mon mari, arrêt du soutien que j'accordais depuis toujours à mes amies, etc.»

Pour le Dr François Baumann, qui vient notamment de publier L'Après burn-out(Éd. Josette Lyon), le traitement de ces troubles complexes ne saurait cependant être seulement comportemental. «C'est là le propre de ces “maladies” sociétales nouvelles - comme le harcèlement moral ou le bore-out - qui, en se développant, montrent de manière de plus en plus patente les interactions du physique et du psychique sur le travail. Celles-ci imposent aux victimes de se poser des questions essentielles: pourquoi cette place du travail dans ma vie? Qu'est-ce que je cherche vraiment à prouver?»

Autre versant du programme de rétablissement: apprendre à connaître d'autres sources de plaisir dans la vie que l'activité tous azimuts et à multiplier les occasions d'en profiter. Car, comme pour la dépression, celui qui a été «brûlé» une fois, et même s'il ne peut l'admettre, reste fragile.

 

Source sante.lefigaro.fr _ Le 06/11/20105

Coup de fatigue ou véritable burn-out, cela n'arrive pas qu'au travail ?